Tous mes vœux de bonne santé ! » dit-on en début d’année. Mais qu’est-ce qu’être en bonne santé en 2023 ? La question ne peut manquer de se poser à la lecture du dernier « Panorama de la santé » publié par l’OCDE. La santé n’y apparaît plus comme une donnée médicale attachée aux seuls individus. Elle est une donnée globale, conditionnée non seulement par le mode de vie des personnes, mais aussi par les dépenses que la société consacre à la santé, à l’accès et à la qualité des soins, à l’environnement, aux politiques de prévention contre le tabac, l’obésité, l’alcool… encourageant chacun à adopter de bons comportements. Qu’est-ce qui a contribué à l’augmentation de l’espérance de vie – plus de 10 ans depuis 1970 ? 

Être en bonne santé en 2023, ça veut dire quoi ?

Les dépenses de santé, évidemment, mais pas uniquement – sinon les Américains qui dépensent plus de 18,8 % du PIB devraient être en meilleure santé que les Suisse (11,8 %). Sont en effet pris en compte le mode de vie et d’alimentation, l’exposition à la pollution ou l’augmentation des études et des revenus, minima en particulier, qui permettent de ne plus renoncer aux soins en cas de besoin. Concrètement : Une progression de 10 % de la couverture de l’enseignement est associée à un gain de 3,2 mois d’espérance de vie, tandis qu’un accroissement de 10 % du revenu par habitant est associé à un gain de 2,2 mois d’espérance de vie. 

La santé devient ainsi une « épaisseur de durée » pour parler comme Bergson, mais aussi une « épaisseur de milieux de vie ». Elle n’est plus dans le sujet, mais en dehors de lui. Comment la définir ? Longtemps, les médecins y ont été réticents. Ils se contentaient de la définition négative de René Leriche : « La vie dans le silence des organes. » Avec l’émergence d’une médecine préventive, statistique et prospective, le besoin se fait pourtant sentir d’une définition positive, qui permette de cadrer les politiques publiques sans pour autant aboutir à une nouvelle norme, à un idéal de santé parfaite ou d’accroissement indéfini des capacités. Dans Éléments pour une philosophie de la santé (Les Belles Lettres, 2017), le philosophe Arnaud François propose de la concevoir comme « le mouvement par lequel la vie s’élève à travers ses propres degrés ». Une définition qui permet de faire une place à la maladie comme aux écarts par rapport à la norme et même de renoncer aux soins quand ceux-ci portent atteinte à la vitalité du patient. Bref, de continuer à boire un verre de vin quand on est français, manger une fondue quand on est Suisse ou à cuisiner à l’huile d’olive quand on est espagnol. Ce que Nietzsche appelait la grande santé !